Ancienne éditrice de livres techniques puis organisatrice de salons pour les entreprises, Sabine Vandebroek est devenue coach en prise de parole. Elle aide des professionnels à mieux capter l’attention lors d’une (visio)conférence par exemple. Savoir sourire et raconter une histoire… des sujets traités en détail sur son blog pro SabineVandebroek.com
Comme beaucoup d’entrepreneurs, tu as vécu plusieurs vies, du salariat dans l’édition… jusqu’au métier de coach indépendant, c’est ça ?
Oui. J’ai fait des études de droit et comme tu sais, le droit mène à tout. Il m’a amenée à travailler pendant 17 ans dans l’édition technique, la publication de livres juridiques pour les notaires, avocats, experts-comptables, directeurs financiers, etc.
Au fil des années, j’ai gravi les échelons jusqu’à devenir éditeur, c’est-à-dire la personne qui organise la publication et le marketing autour d’une collection d’ouvrages. J’ai eu l’occasion de me former, de progresser en interne, et j’avoue que je me suis quand même amusée dans l’entreprise durant les premières années.
Les choses se sont dégradées avec le temps. Je ne pouvais plus guère proposer de choses originales pour nos actions marketing, et comme ce secteur a traversé une crise avec des rentrées financières en baisse, je me suis retrouvée aux portes du burnout. Sans tomber malade, heureusement.
D’autres interviews de BlogueusePro ont aussi abordé le burnout, c’est un déclencheur qui amène beaucoup de pros “seniors” à changer de vie ou d’horizon…
Je n’en étais pas très loin. Le business était en décroissance, et je n’avais plus l’impression de respecter mes valeurs. J’avais le sentiment d’être dans le mensonge quand il fallait défendre les mérites d’une campagne marketing que je trouvais moi-même trop chère. Je m’épuisais dans des opérations marketing très créatives mais sans retour sur investissement. Ce métier ne me correspondait plus. Je me suis rendu compte que j’ai passé 17 ans à un endroit qui n’était pas fait pour moi.
Comment as-tu quitté cet employeur ?
J’ai vécu mon licenciement comme une libération. Une délivrance ! J’ai eu la chance d’obtenir une confortable indemnité de licenciement. De quoi vivre un certain nombre de mois sans m’inquiéter sur mon avenir. Je pensais faire une pause pendant 1 an. Elle a duré juste une semaine.
Comment ça ? Tu as démarré tout de suite une autre activité ?
Parce que j’avais une bonne connaissance du secteur, on m’a proposé une mission de courte durée intéressante, dans le secteur de l’édition. Mais surtout, une deuxième mission m’a fait basculer dans le monde de l’événementiel pro. On m’a proposé d’organiser en Belgique un événement comparable au Congrès des Experts-comptables qui existe en France. C’était très stimulant. Au point que cela je m’en suis occupée pendant plusieurs années.
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Tu as donc travaillé en indépendante pendant plusieurs années ?
Oui. En 5 ans, j’ai amené le congrès à décupler son audience. L’événement est passé de 400 à 4000 visiteurs et de 300 000 euros à 1 M€ de chiffre d’affaires. Je faisais plusieurs métiers à la fois, et j’apprenais beaucoup, en y prenant du plaisir malgré des journées très chargées. A l’approche du congrès, je passais d’un mi-temps à l’équivalent de deux temps-pleins. Mais j’y arrivais, et ça se passait plutôt bien.
Malheureusement, les attentats ont cassé cette dynamique. D’abord l’attentat du Bataclan. Alors que nous préparions l’édition de fin novembre, ce triste évènement du 10 novembre 2015 a semé un vent de panique chez nos partenaires et nous a contraint à annuler. Nous avons pu réagir auprès de nos exposants, négocier avec nos fournisseurs et reporter l’évènement au 24 mars 2016. Or seulement deux jours avant cette date, c’était l’explosion à l’aéroport de Bruxelles. Il a évidemment fallu annuler pour de bon. L’activité du congrès a bien pu reprendre par la suite, mais j’avais perdu énormément d’énergie et de nombreux partenaires exposants ont quitté l’aventure et ne sont plus revenus.
Il y a parfois des événements impossibles à anticiper, qui peuvent mettre en danger une activité pro. La crise de la Covid en est l’exemple…
Oui.
Qu’est-ce qui t’a amenée à former à la prise de parole sur une scène ou devant un écran ?
Le chant ! En parallèle de l’organisation de congrès, j’ai réalisé un vieux rêve en prenant des cours de chant, pour la première fois de ma vie. Auparavant, quand j’étais salariée avec les enfants, un mari et des horaires, je ne trouvais jamais le temps pour ça. Suivre des cours en école de chant m’a fait sortir de ma zone de confort. Il a fallu monter sur scène pour chanter, ce qui était énorme en soi pour moi. Et là, j’ai découvert une passion : celle de faire chanter les autres, faire participer le public !
Je me suis rendu compte qu’emmener les autres personnes vers une histoire, c’était quelque chose qui me correspondait. J’ai alors créé des ateliers de motivation d’équipe, de team building à travers le chant. J’ai rejoint en parallèle l’AFCP, l’Association Française des experts et Conférenciers Professionnels, et j’ai profité de mon expérience des salons pour la partager dans des livres et des workshops. Aujourd’hui, mon ambition n’est pas de former des conférenciers professionnels, mais de faciliter et améliorer la prise de parole pour tous ces cadres, professionnels ou dirigeants de tous horizons qui aimeraient avoir plus d’impact.
Quel est le problème pour les pros qui prennent la parole en public ?
Pendant 10 ans de congrès, j’ai commercialisé environ 1500 conférences. Et chaque année, mes partenaires me reprochaient « C’est cher et ça ne me rapporte rien ». La raison était simple et multiple à la fois : l’orateur n’était pas la bonne personne, n’était pas assez préparé à parler en public et n’était pas assez précis ni efficace dans son approche pour vendre ou donner envie au public d’adhérer à l’idée, au service, au sujet de l’intervention. Mieux vaut toujours se préparer, car cela permet d’être bon et convaincant… sans même parler du stress. Bien parler en public implique du travail et du savoir-faire.
J’aime bien citer une statistique qui dit que 3 personnes sur 4 ont peur de prendre la parole en public, et que les 25% restants pensent que leur charisme suffira.
Tu as même écrit un livre sur le sujet…
J’avais accumulé et testé diverses techniques de prise de parole. Je me suis intéressée à l’utilisation de la voix, à l’attitude et à la gestuelle, aux bonnes façons pour l’orateur de collaborer avec l’organisateur de l’événement, etc. J’ai donc écrit un livre : « Organisez et donnez une conférence qui fait vendre« , chez l’éditeur L’attitude des héros.
Comme au théâtre, j’explique qu’une bonne prise de parole dépend de l’alchimie entre plusieurs métiers. Il faut penser en scénariste, en metteur en scène pour préparer son décor, structurer une belle présentation Powerpoint, une vidéo.
Se mettre aussi parfois dans la peau d’un acteur, d’un comédien pour trouver le bon ton, la bonne intonation. Sans oublier de comprendre le point de vue d’un producteur : celui qui organise l’événement, met à disposition une infrastructure (la salle, l’éclairage, la régie son) et s’efforce de remplir la salle. Il faut prendre en compte tous ces aspects d’un même événement pour que la prise de parole soit réussie.
Il y a donc des erreurs à éviter ?
Beaucoup et elles sont majoritairement liées à un manque de préparation. Je me souviens d’une personne qui découvrait, pour sa première fois sur la scène, la présence d’un moniteur de retour vidéo. Une caméra la filmait, si bien qu’elle a passé l’essentiel de sa conférence les yeux rivés vers le sol à regarder l’écran.
Comment travaille-t-on avec une coach comme toi ?
J’accompagne la personne qui va prendre la parole, par exemple un directeur commercial qui veut animer une réunion avec son équipe de ventes, un entrepreneur qui présente son offre ou son entreprise lors d’un salon, etc…. J’apprends à trouver le bon contenu, la bonne intro et la bonne conclusion pour une prise de parole qui peut durer de 5 min à 1h. Mais il ne s’agit pas simplement de donner des astuces techniques.
3 personnes sur 4 ont peur de prendre la parole en public, et les 25% restants pensent que leur charisme suffira.
C’est-à-dire ? Comment corriger le problème, alors ?
Avant de donner des conseils ou corriger une difficulté, je cherche d’abord à travailler sur les croyances limitantes. Par exemple, le sourire est fondamental. J’ai un conseil simple : souriez, c’est impératif. Cela vous rendra plus sympathique, et vous donnera plus d’impact auprès de l’audience. Or un jour, je devais préparer une personne à sa prise de parole le lendemain. Elle était convaincue qu’elle ne pouvait pas sourire. Nous avons passé trois heures sur ce sujet, pour le débloquer. Je n’ai pas travaillé sur sa prise de parole mais bien sur son sourire, car c’était la base, avant même de parler d’une communication efficace.
Pourquoi ne souriait-elle pas ? Elle avait un défaut physique, des dents abîmées ?
Pas du tout ! Rien à voir avec un quelconque problème physique. On ne lui avait tout simplement pas appris. Or en débloquant ce frein, c’est comme si une autre personne était montée sur scène. Les témoignages que j’ai reçus ont été enthousiastes : sa prise de parole a été réussie et la personne était comme transformée, en positif. Il faut donc parfois corriger certains défauts dans la communication aux autres. Je me souviens d’une personne qui avait une peur bleue de parler sur scène. Il faut parfois remonter aux sources, à l’éducation. En l’occurence, on lui avait mis un papier collant sur sa bouche étant petite car elle parlait trop. Une mauvaise expérience quand on est enfant peut laisser des traces dans le comportement de la personne devenue adulte.
La timidité n’aide pas non plus…
On peut souffrir d’une timidité maladive. C’est parfois parce qu’on a gardé l’empreinte d’un jugement, d’une petite blessure. Quelqu’un a ri un jour de ce qu’on a dit, ou un parent pour qui on ne parlait jamais assez bien, etc. Il faut aussi affronter la peur de ne pas être légitime. Cela génère du stress, qu’on gère notamment avec de la respiration et des rituels.
Si, pour conclure, tu devais nous partager un conseil lié à la prise de parole, que ce soit en public ou en visioconférence ?
N’écoutez pas n’importe qui pour faire le point sur votre situation. Donnez la préférence à quelqu’un de légitime pour donner un feedback sur votre prise de parole. Idéalement un coach ou un professionnel du sujet. Ce n’est pas un collègue, surtout s’il ne prend jamais la parole, qui pourra vous faire un retour pertinent, une critique constructive sur votre façon de parler et de faire en public. Et si vous donnez votre propre avis à quelqu’un, évoquez positivement des points d’améliorations, ne dressez pas une liste d’aspects négatifs. C’est toujours plus agréable et plus motivant pour l’autre.
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